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Gestion et entretien des moteurs en catamaran

Allez, bonjour à tous et à toutes. Vidéo aujourd’hui sur la gestion des moteurs en cata, un petit peu d’autonomie par rapport à ça, par rapport au diesel, par rapport à tout ça. On va parler moteur, mécanique, gestion, quelque chose qui concerne tout le monde et je pense que c’est sympa de partager là-dessus. J’espère que vous avez regardé et profité de la vidéo précédente sur le coefficient de tournement de catamaran et ce qu’il y avait à dire là-dessus. Pour ceux qui l’ont pas fait, le pack vidéo, faites-le, abonnez-vous, mettez la petite cloche et soyez les bienvenus. Alors il y a deux écoles sur l’utilisation des moteurs en cata. Il y a une école où, quand je dis une école, il y a deux habitudes, deux façons de faire. Pour la plupart des propriétaires, ils estiment donc… ils font tourner leur moteur à peu près le même nombre d’heures, et donc tous les 300, tous les 500 heures en fonction du moteur — ils vont faire 350 h on va dire — ils font leur vidange. Donc ils amènent… voilà, ils les font suivre, tac tac, hop, ils arrivent aux deux moteurs aux environs des 350 h, pas à 20 h près ou 50 h près, et là ils s’arrêtent, ils font la vidange des deux moteurs, ils changent les huiles, ils vérifient que tout va bien, les filtres, tout ce que vous voulez, et c’est reparti pour 350 h de moteur des deux côtés. Et puis il y a une deuxième façon de faire : c’est de se dire — on va dire que c’est 300 h pour prendre un chiffre facile — on se dit voilà, je vais décaler mes moteurs de 150 h, et je vais en avoir un qui est par exemple à 300, et l’autre je vais l’avoir à 450, et je vais continuer comme ça. Et quand le 1, celui qui est à 450, va arriver à 600 h, le deuxième sera à 450. Ce sera pas l’heure de lui faire la vidange, je vais faire la vidange et tout ce qu’il faut de celui-là. Une fois que ça c’est fait, je vais continuer à les décaler, bam, ça va être le tour de celui-là, etc., etc., etc. Et donc on a les moteurs décalés de la moitié du nombre d’heures en navigation. Alors ça fait qu’on fait deux fois plus… on fait le même nombre de vidanges, mais on fait deux fois plus de moments différents, puisque dans le premier cas on peut faire les deux en même temps, des deux moteurs, on passe une matinée, on fait ça, on n’est pas embêté, on est au mouillage, on a choisi le jour, on a préparé le bidon, on amène ça à la déchetterie, pas les jeter dans la poubelle, et dans un sac de recyclage, tout ce qui va bien. Alors que dans le deuxième cas, il faut s’y coller beaucoup plus régulièrement. Alors moi j’ai toujours pris la méthode numéro 2, celle où on s’y colle beaucoup plus régulièrement, et je vais vous expliquer pourquoi. Peut-être que vous allez pas… voilà, vous allez pas l’aimer. Je dis pas que c’est celle qu’il faut suivre du tout, mais voilà, c’est celle que j’applique, et voilà pourquoi je l’applique. Premièrement, comme vous le savez, en général, on fait pas tourner les deux moteurs en même temps, à moins que… voilà, vous ayez vraiment du vent ou du courant de face, et vous voulez vous mettre à l’abri, et que voilà, il y a 15 milles à faire, et que tu dis bon, on met les deux moteurs, on y va. Mais en général, on alterne l’utilisation de nos moteurs. Donc dans un cata où il y aurait on va dire 450 à 500 L de diesel, des moteurs qui font entre 3,5 et 4 L (pour ceux qui ont des plus gros moteurs, ça consomme 5 L), donc grosso modo, s’ils font 4 L on va dire, et tu as 400 L de gasoil, tu as 400 milles d’autonomie. Et s’ils font 3,5 et que tu as 500 L, bon voilà, tu as plus, 500 à 600 milles d’autonomie. Donc tu fais tourner qu’un moteur en général. Et si tu fais un petit peu de moteur-sailing dans du petit temps — alors là, si vous avez pas regardé ma vidéo sur le choix des voiles, je vous engage à la regarder parce que c’est ma spécialité de faire du moteur petit temps — ce que vous faites, c’est que c’est le moteur qui est donc sous le vent… si j’ai le vent qui vient de mon tribord, je vais mettre mon moteur bâbord en marche pour faire donc… il a tendance à pousser la coque vers le vent, et parce que si je mets l’autre en marche, il a plutôt tendance à faire abattre. Donc ce que je veux, c’est plutôt l’effet inverse, garder mon cap, et ça facilite la vie du pilote. Donc c’est comme ça en général qu’on navigue, et on alterne les moteurs.

Alors pourquoi j’utilise la deuxième méthode ? Tout simplement parce que : un, je veux pas me retrouver un jour en train de me dire “punaise, celui-là il est arrivé au bout, l’autre il est arrivé au bout”, et là il faut que je me tape 100 milles au moteur parce que j’ai pas trouvé les pièces, il y a un créneau de vent qui va pas bien, il y a une dépression qui arrive, machin, etc. Donc il va falloir que j’aille me taper du moteur, et j’ai pas fait mes vidanges parce que j’ai traîné, parce que là, dans le cas dans lequel je suis, j’ai un des deux moteurs qui est toujours utilisable. Donc ça c’est une chose qui est pas mal. Deux, lorsque j’ai les moteurs alternés comme ça, si pour une raison quelconque j’ai oublié ou j’ai pas trouvé, ou il me manque un filtre, ou j’ai pas l’huile qu’il faut, ou j’ai machin — trouver pour les deux moteurs c’est plus dur que de trouver pour un. Et si quand je suis en train d’aller dans ma caisse où j’ai mes filtres, etc., je me rends compte qu’il manque des pièces, je suis pas en train de stresser. Je me dis “ben j’ai encore 150 heures à faire sur celui-là, et celui-là je vais réussir à faire ce qu’il faut dessus”. Donc je me garde une marge de sécurité là-dessus. Et l’idée pour moi c’est celle-là, c’est de me dire que j’ai une marge de sécurité tout le temps. Alors le coup de pas de bol c’est que j’ai un des deux moteurs qui tombe en panne, et c’est celui qui est pas arrivé au niveau de service qui tombe en panne, et que j’ai l’autre qui est arrivé à sa limite d’heures. Mais si tu les gères les deux avec le même nombre d’heures, il va t’arriver la même chose : si un des deux a un problème, le deuxième sera à sa limite d’heures pareil. Donc ça c’est pas un argument. Et si tu as un peu de chance, par contre, et que tu les as pas au même nombre d’heures, et que tu as un des deux qui tombe en panne et que c’est pas celui qui est arrivé à sa limite d’heures, ben ça tombe bien, tu peux le faire tourner. Donc voilà. Et le truc qui peut arriver aussi — ça ça arrive régulièrement, ça arrive à tout le monde, ça m’est jamais arrivé, mais je l’ai vu trois fois donc j’ai l’habitude — c’est d’avoir un bout qui traîne dans l’eau et de le mettre dans l’hélice, ou de prendre un casier, ou une bouée, un machin… Et là, les saildrives, 9 fois sur 10, tu te fais le joint du saildrive. Et donc si tu as des hélices qui sont rétractables, etc., tu te rends tout de suite compte qu’il y a du retard à la mise en fonctionnement, marche arrière, parce que forcément voilà… Et quand tu vas faire ton niveau d’huile à l’intérieur, tu te rends compte que tu as une espèce de mayonnaise et pas du tout de l’huile que tu as normalement dans le saildrive. Et tu sais que voilà, c’est le moment de… Et là c’est pareil : si ça vous arrive et que vous avez le deuxième moteur qui a un paquet d’heures qu’il peut faire et qu’on est bien, ou que le deuxième il faut faire la vidange, vous avez qu’un à gérer, et c’est moins le bordel.Donc pour toutes ces raisons, moi j’ai plutôt tendance à faire ça. Je sais que j’ai toujours un de mes deux moteurs qui est navigable. Voilà. Quand j’ai une vidange à faire, si je peux pas la faire parce que je m’étais dit qu’au Cap-Vert j’allais trouver les pièces et que je trouve pas les pièces au Cap-Vert, dans mon lot de pièces il va rester de quoi faire une vidange d’avance. Et ça c’est pareil, toujours — alors là je vous le dis — n’ayez jamais une seule vidange d’avance pour les deux moteurs. Ayez une vidange d’avance pour chaque moteur. Je sais que ça fait chier de se trimballer des bidons d’huile à pas savoir quoi en faire, mais plutôt que de vous amener des bidons de gasoil sur le pont sans fin, allez plutôt prendre de quoi faire deux vidanges : une sur bâbord, une sur tribord ; deux filtres à huile, deux filtres à gasoil, et vous êtes bien de chez bien, et vous êtes pas embêtés. Il y a plein de moments où on trouve pas les pièces. Alors pour ceux qui ont tendance — j’ai envie de dire malheureusement mais par facilité — à rester dans le guide du routard de la navigation, à savoir : je sors, je vais aux Canaries, des Canaries je vais pas trop aller au Cap-Vert, du Cap-Vert je vais aller aux Antilles, et puis je reste entre la Martinique, la Guadeloupe, Saint-Martin, machin… Bon, ça va pas vous arriver, vous aurez pas ce genre de problème. Mais pour ceux qui sont un petit peu plus des aventuriers, et qui ont envie d’aller se faire… je sais pas… Brésil, l’Amérique Latine, qui vont aller traîner un petit peu du côté du Panama ou du Venezuela, qui vont remonter un petit peu en République Dominicaine, aux USVI, aux BVI, etc., qui vont aller aux Bahamas — les Bahamas je conseille à tous d’y aller — je crois que la Polynésie c’est magnifique, les Bahamas c’est extraordinaire. Pourtant j’ai passé un an et demi au Club Med à Bora, donc je peux vous dire que la Polynésie je l’ai bien traînée, j’ai plongé avec les dauphins, on y est passés en bateau, j’ai fait de la voile, j’étais moniteur de plongée, bref. Donc j’ai quand même bien connu la Polynésie, c’est un endroit où j’ai eu un bateau. Et ben je vous assure que les Bahamas c’est autre chose.

C’est autre chose, pas dans le sens « mieux » ou « moins bien », mais c’est vraiment différent. Ce que j’ai trouvé fou aux Bahamas, c’est cette sensation de liberté. Tu peux mouiller quasiment partout, il n’y a pas 10 000 bateaux autour de toi, t’as pas besoin de réserver une bouée, tu peux faire 40 milles dans la journée, jeter l’ancre dans 1,50 mètre d’eau turquoise, avec du sable blanc sous la coque, et t’as personne qui vient te demander de payer. Ça, pour moi, ça n’a pas de prix. Et en plus, ce sont des navigations faciles. Pas trop de courant, pas trop de vent fort, t’as des passes bien balisées, t’as le guide Pavlidis ou d’autres guides locaux qui t’expliquent très bien comment entrer, sortir, où sont les têtes de corail, etc. Donc si t’es bien préparé, honnêtement, c’est une navigation qui est accessible à beaucoup de gens.

Mais pour revenir à nos moteurs, aux Bahamas comme ailleurs, tu fais pas le plein toutes les deux semaines. Donc si t’as pas prévu ce qu’il faut — les filtres, l’huile, les joints, tout ça — tu vas te retrouver coincé. Et là-bas, quand tu veux commander une pièce, tu te rends vite compte que soit elle est pas dispo, soit tu vas payer trois fois le prix, soit tu vas devoir attendre trois semaines qu’elle arrive de Miami. Donc voilà pourquoi je dis : anticipez. C’est pas une question d’avoir peur, c’est une question d’être tranquille.

Et enfin, un autre point sur lequel je voulais insister, c’est sur la formation. J’ai plein de gens qui me contactent pour un accompagnement à l’achat, qui ont parfois déjà signé, et qui ne savent pas faire une vidange, qui ne savent pas purger une ligne de gasoil, qui ne savent pas ouvrir un saildrive. Alors je dis pas ça pour juger — chacun son expérience — mais c’est pas sérieux. Parce qu’en mer, t’as pas un mécanicien toutes les 10 milles. Et quand t’as une panne moteur à l’entrée d’un port, dans un chenal, ou au moment de remonter l’ancre dans un coup de vent, là t’es content de savoir mettre les mains dedans.

Donc formez-vous. Même un minimum. Il y a plein de tutos sur Internet, il y a des formations, il y a même des bouquins très bien faits. Prenez une journée avec un pro, ou venez faire une remise en main complète quand vous achetez votre bateau. Moi j’en fais régulièrement. Et croyez-moi, ça vaut de l’or. Parce qu’une fois que vous êtes partis, c’est trop tard.

Voilà, c’était ma vision un peu large de la gestion moteur sur un cata. C’est pas forcément celle de tout le monde, mais c’est celle que j’applique depuis des années, qui m’a sauvé plus d’une fois, et qui m’a permis de dormir tranquille, même au milieu de nulle part. Merci à tous, prenez soin de vos moteurs, et on se retrouve très vite pour une prochaine vidéo.