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Conseil de traversée en catamaran

Analyse de traversée et conseil Catamaran

Apparemment c’est le dernier coup de vent qu’on prend, ça devrait se calmer en fin de journée. Bon, on fait des faritas pour se donner du courage. Comme on peut le voir derrière, c’est pas la fête. Des zones très courtes se suivent les unes derrière les autres, et elles tapent pas mal sous le bateau.

Bon, du coup, on avance fort sur le cap. Forcément, on tourne à 7,8, mais la nuit a été super mouvementée. On fait gaffe de pas faire de départ au lof. Hier soir, en fin de… en fin de soirée, on a pris le ris numéro 2, histoire d’anticiper. Là on a un bout de génois, donc GV 2 ris, Marine qui mange pas comme tous les midis, c’est son quart, et on essaie de faire que ça se passe bien.

On a un voilier là-bas, tout à fait à l’horizon. Je pense pas que vous le voyez.

— Il y a combien, Marine ?
— Il y a 26.

Et donc bon voilà, pas de quoi vous en raconter plus. Le pilote tient. Ça doit s’arrêter vers 17 h, donc on attend patiemment 17 h que ça descende un peu. La houle monte pas plus que ça. Elle a pas dépassé les 3 m, 3,50 m, donc c’est plutôt cool.

Allez, la suite quand ça sera calme. Là, y’a pas grand-chose à raconter, à part que quand même, y’en a qui se laissent pas mourir de faim. [Applaudissements] Oui, on se fait des faritas pour se donner du courage.

Alors, petit débrief de ces 870 milles, donc des Canaries vers le Cap-Vert. Alors pas un débrief sur nos feelings, mais débrief sur le bateau, les options qu’on a prises, les options voile, matériel, météo, etc.

Alors on va commencer par les points négatifs, et j’espère que ça vous aidera à faire des choix pour le futur.

Premier point négatif : même en ayant pris la météo de façon relativement sérieuse, on se rend compte qu’on est… au pire, il nous avait annoncé 20 nœuds avec des rafales à 24–25, et on s’est retrouvés dans 25 établis avec des rafales à 30.

Là, au moment où je suis en train de faire la vidéo, on est censés être dans 12–13 nœuds de vent, et on est plutôt dans 17 établis. Alors là, ça nous fait plaisir parce qu’on veut du vent pour arriver, mais il se trompe relativement tout le temps vers le haut sur ce créneau-là.

Ce qui nous amène à une deuxième conclusion, c’est que donc quand on se retrouve dans 25 à 30 nœuds avec des rafales, on se met à la barre à côté du système de commande, en disant que le pilote va pas tenir. Et là, si on avait eu un cata sur lequel on était sur les marches arrière, avec la houle qui te rattrape et les coups de vague qui claquent, même en tournant à plus de 7 nœuds, c’est pas un endroit où t’as envie d’être. C’est pas un endroit où t’as envie de laisser tes équipiers la nuit.

Donc ça, étant donné que la météo est souvent plus forte, et que quand il y a des conditions qui sont costaudes, t’es obligé d’être à côté du poste de barre, ça rejoint ce que j’avais dit sur les choix de catamarans : le choix d’un catamaran avec une barre sur les marches arrière ou un poste vachement exposé, pour moi, c’est la mauvaise option. Là on est en haut, sur le cockpit, on était bien en sécurité et loin de la vague.

Alors, le bémol sur ce que je suis en train de dire là-dessus, c’est que, comme vous avez vu sur la descente du Maroc, on a perdu le système de barre. Et forcément, quand on a un poste excentré — donc ou en haut (flybridge) ou excentré latéral — le système de câbles qui descend, c’est beaucoup plus compliqué qu’une barre directe sur les marches arrière. Donc il y a du pour et du contre. Mais concrètement, le nombre de fois où tu pètes ton système de barre, c’est peut-être jamais dans la vie du bateau, ou si tu fais attention, jamais. Le nombre de fois où t’es à la barre sur les marches arrière parce que la météo est grosse, c’est pratiquement tout le temps. Donc là, c’était un bon choix.

Point négatif qu’on a là : on se rend compte qu’on a du mal à finir sur le cap. Là, il nous reste à peu près 200 milles à faire, et comme le bateau… j’ai pas de code zéro ou de gros gennaker à bord, sur enrouleur ou emmagasineur que je puisse ouvrir et travailler, on se rend compte que là, c’est plein vent arrière pour aller sur Mindelo, et que donc on arrive à tenir un bord au 150°, 145° d’un côté ou de l’autre, et finalement, on est de chaque côté de l’objectif, mais on y arrive pas en ligne droite.

Alors, c’est pas très gênant parce qu’on a des conditions cool, etc., mais il n’empêche que là, entre faire 6 nœuds de moyenne sous gennaker ou faire ce qu’on fait dans les conditions où on est, c’est 5 à 7 h d’écart sur l’arrivée. À partir du moment où on est à 300 milles de l’arrivée, 5 à 7 h d’écart sur l’arrivée, c’est une arrivée de jour ou une arrivée de nuit.

Là, en ce qui nous concerne, si on avait tenu les 6 de moyenne, on serait arrivés de jour au Cap-Vert. Et là, étant donné qu’on est en train de tirer des bords de chaque côté, que j’ai trop de vent pour envoyer le spi, et donc on est obligés de tirer des bords, on va arriver plutôt entre 23 h et 3 h du mat, quoi. Donc en fonction de ce qu’on va tenir comme vitesse.

Donc le gennaker sur emmagasineur ou un gros code zéro, je pense que c’est une option qui est payante pour les fins de nav, pour affiner, et sur le petit temps. Parce que le spi de nuit, c’est quand même compliqué.

OK. Et là, vous voyez, pendant que je suis en train de parler, le vent est en train de remonter à 20 nœuds. Donc là, même si j’avais été en limite de spi — parce que 17 en réel, c’est jamais que 13 en apparent — maintenant on est à 20. Là je pense qu’en réel, on commence à être à 15–16 en apparent, et là c’est plus la même. Le spi, faut le rentrer. Alors que là, ben un coup de gennaker, on enroule, et on n’en parle plus.

Donc voilà. Grosso modo, sur cette descente, la météo est plus forte que ce qu’elle avait été prévue. Donc on touche plus de vent que ce qu’on croyait. Etant donné qu’on touche plus de vent que prévu, on est obligés de passer du temps à la barre. Et si on passe du temps à la barre, on n’a pas envie de les passer sur les marches arrière avec des barres exposées. Donc le choix cockpit excentré ou flybridge, c’est une bonne option. Et avoir quand même une voile facile à gérer sur emmagasineur pour pouvoir faire du 180, même si le bateau avance moins bien, c’est quand même sympa.

Voilà. Rien de plus. La gestion de la bouffe et du gaz : assez simple. Les quarts sont bien faits, même si, encore une fois, quand ça bombarde, t’es plus content d’avoir tes croulants là-haut en sécu que de les avoir en bas sur une marche près de l’arrière.

Voilà. Aujourd’hui, là, on est GV complète, génois complet. Voilà, on tire un bord, on est sur la fin. Ils annoncent qu’à 13 h ça va tomber, mais c’est gris, c’est pas impossible qu’on ait des averses. Donc c’est pareil, envoyer le spi là-dedans, c’est une voile qui demande quand même de la tension quand ça monte, et pour la rentrer, c’est compliqué. On va voir comment ça va faire.

Allez, la suite avant la nuit, et puis demain avant l’arrivée. Merci.

Bon, comme vous le savez, une navigation sans spi, c’est pas une navigation. Donc voilà. On a changé la config, on l’a mis sur le côté bâbord — écoute tribord — donc on a bougé. L’avantage de travailler avec de la dyneema, c’est qu’on peut bouger les points d’accroche. Donc voilà, d’un côté prise, de l’autre aussi, et puis voilà.

Et là on est plutôt pas mal en direction du Cap-Vert. Bon, ils avaient annoncé un calme aujourd’hui, donc ben on en profite du calme. Ah, faut avoir confiance, hein.

Allez, moi l’équipe là-bas… Ah là je vous dis, y’en a pas un pour rattraper l’autre, hein. Là j’ai une bande de bras cassés, mais bon, ils sont cools. Voilà, des petites conditions.

— Il y a combien de vent, là ?
— Voilà, donc on a 11 nœuds de vent apparent.

Et on fait combien ? On fait 5.1, 5.2. Voilà. On doit faire 5.5 vitesse fond. On est contents.

Allez, dernière journée de nav avant l’arrivée sur le Cap-Vert. Conditions plutôt calmes et stables. Toute petite houle, 13–15 nœuds de vent arrière. On est gentiment sous spi. Il nous reste aujourd’hui 70 milles, je crois, pour arriver — 60 milles pour arriver. On va arriver dans la nuit.

Ça a été une nuit encore un peu poussante. On n’a pas gardé le spi de nuit. On a envoyé la GV et le génois, et puis on a renvoyé le spi ce matin.

Alors la nuit, on arrive à prendre des rafales un petit peu. Cette nuit, j’ai eu droit à un 22 à un moment donné. Mais bon, de manière générale, la journée, là, ça tient. On a eu au plus haut 16 nœuds en apparent, donc c’est tranquille.

Alors le spi, c’est vraiment bien : le bateau bouge pas, ça avance, on tourne à 6 nœuds, ça va tout droit, on est pile poil sur le cap. On a pris les paris sur à quelle heure on allait voir la terre, et puis on fait passer le temps. Hier on a fait une dorade, mais aujourd’hui on fait tr… d’ailleurs, mais aujourd’hui on tire les lignes, il se passe rien. C’est un peu râlant parce qu’on voit plein de poissons volants, on voit plein de petites dorades sauter et suivre l’ombre du bateau, chasser les poissons. Mais nous, on chope rien.

Bon bref, voilà. Ah, il est là le loup, il est là.

Donc, arrivée dans la nuit. On va mouiller, et puis demain, on ira faire les formalités